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How the ancient Church of Bedyal was destroyed
by Saddam's regime(Article in French)
Ayoub Barzani
Shimo Maksud Shimo ne quitte plus sa tenue de combat. Dans le regard sombre de ce chrétien chaldéen du haut Kurdistan, la mort de son village laisse une trace ineffaçable. Les soldats irakiens qui cernent les maisons, la population emmenée en déportation, la marche dans la montagne et soudain l' explosion: sur Beydal dynamitée s' élève un  nuage de fumée noire. C'était un jour d' automne 1978. Shimo Maksud Shimo a pu échapper à l' engagement de force dans l'armée irakienne. Beaucoup de ses anciens compagnons sont aujourd'hui prisonniers en Iran. Devant les derniers pans de mur de son église, il peut contempler l' un des témoignages douloureux de l' histoire pourtant brillante de son peuple.

Les Assyro-Chaldéens occupaient le troisième millénaire avant J.-C.les régions comprises entre le Tigre et l’Euphrate. En 612 avant J.-C. après l' écroulement du puissant empire Assyrien, Babylone est occupée, Ninive rayée de la carte. Les tribus chaldéennes fondent alors la dynastie des rois de Babylone. Le plus célèbre d' entre eux, Nabuchodonosor, envahit le royaume de Judée en 586 av. J.-C., détruisant ainsi le dernier bastion de l'indépendance juive. Des milliers d'hébreux furent emmenés en captivité jusqu’en 538, quand Cyrus II, Grand Roi des Perses, entra dans la ville, laquelle tombera à nouveau en 325, sous les armées d’Alexandre le Grand.

Naissance et mort d’une comunanté chrétienne

A l’avènement du christianisme, les Assyro-Chaldéens se convertissent à la nouvelles religion, tout comme leurs voisins du Nord, les Arméniens. Entre le IVè et le XIIIè siècle, après J.-C., l’Eglise assyrienne étend son influence de l’Egypte à la Chine, avec plus de 60 millions de fidèles. L’invasion mongole, au XIIIè siècle, met fin à son expansion. Les envahisseurs contraingnent les chrétiens à se réfugier dans les montagnes imprenables du Hakkiaria, au Kurdistan. Les réfugiés s’organisent en régime théocratique et édifient leurs lieux de culte parmi les Kurdes musulmans. De bonnes relations s’établissent entre chrétiens et Kurdes.

Mais, dès le XIXè siècle, la situation commence à se détériorer. Les sultans ottomans décident de ne plus respecter la politique de « laisser-faire » suivie jusqu’alors envers les princes kurdes; 1867 marque la chute de la dernière principauté kurde, le Bottan.

Par ailleurs, à la même époque, les missionaires européens viennent s’établir au Kurdistan. Les relations entre ces missionaires et la population chrétienne suscitent peu à peu la méfiance des Kurdes; la propagnade turque accentue les soupçons.

En  1909, les Russes réoccupent Ourmia et Tabriz (nord de la Perse). Les Russes favorisent les chrétiens, qui font cause commune avec eux, et persécutent les Kurdes. Cette attitude aura des conséquences désastreuses pendant et après la Première Guerre Mondiale. Les Assyro-Chaldéens doivent quitter le Kurdistan, notamment après les massacres qu’ils subissent entre 1915 et 1918. Les dirigeants turcs tentent de les éliminer, avec les Arméniens, car ils sont jugés «inturquifiables » !

Ces chrétiens retrouvent espoir après la capitulation de l’empire ottoman, dans la conviction que Britanniques et Français vont favoriser la création d’un foyer national. Les Assyro-Chaldéens ont en effet participé à la guerre au côté des Alliés sur le front du Caucase.

Mais la France et la Grande-Bretagne n’agissent pas comme ils l’espèraient. Le Traité de Sèvres (août 1920, article 62) leur accorde, selon les dispositions prévues en faveur des minorités non-musulmanes de Turquie, seulement garantie et protection dans le cadre d’un Kurdistan autonome, mais non érigé en Etat indépendant. Avec le Traité de Lausanne entre les Alliés et Mustapha Kemal Pacha, en juillet 1923, Arméniens, Kurdes et Assyro-Chaldéens perdent toute existence légale.

Sous le protectorat britannique, les Assyriens viennent s’installer en Irak. Lorsque ce pays accède à l’indépendance en 1932, les populations assyriennes reçoivent la promesse de pouvoir survivre en unité ethnique homogène. Déçues dans leur attente, une partie d’entre elles, se replie sur la Syrie. Les autres, demeurées en Irak, subiront une deuxième persécution, qui fit entre 500 et 3000 morts. L’Irak appelle ces évènements… « les incidents » !

Deux groupes assyro-chaldéens subsistent aujourd’hui. Les Chaldéens catholiques, environ 1 million, sont établis en Irak. Leur chef, appelé «patriarche de Babylone», réside à Bagdad. Il est en communion avec Rome. Les Assyriens sont envrion 400’000, dont le tiers vit au Moyen-Orient. Le reste est dispersé dans le monde. De religion nestorienne orthodoxe, ils forment une Eglise indépendante dont le patriarche vit à Chicago. Deux milles Assyriens vivent en Suisse.

L’Accord d’Alger, passé entre Téhéran et Bagdad en 1975, dirigé contre les Kurdes, entraîne la chute de Barzani -l’âme de la révolte kurde en Irak- qui mourra en 1979. La situation des kurdes et des Assyro-Chaldéens s’est ainsi nettement dégradée après cet Accord.

Avant la fin de la révolte kurde, en 1975, environ 40’000 Chaldéens vivaient au Kurdistan irakien, dans le district de Badinan, près des frontières turques et syriennes. Ils étaient dispersés dans 180 villages. Il n’en reste que 30 actuellement, mais rien ne permet d’espèrer qu’ils seront épargnés. En 1978, le gouvernement de Saddam Hussein a tenté d’accélérer le dépeuplement des campagnes kurdes. C’est ainsi que ni l’ancienne église, ni le village chaldéens de Beydal n’échappèrent à la destruction.

Une terrible explosion

Les ruines de Beydal sont situées dans la région de Barzan, sur les pentes Est du Mont Shirin. Or, l’église du village avait pendant des siècles, inspiré le respect de tous les habitants, musulmans et chrétiens. Personne n’osait toucher à cet édifice sacré. Ce respect reposait sur une vieille légende: quand l’armée musulmane traversa le haut plateau de Sare-Mazna à l’époque de l’expansion islamique, son chef aperçut au loin les murs blancs de l’église. Indiquant du bras la direction où les soldats avaient ordre de tout détruire, il resta figé dans son geste. Le chef se rendit compte que Dieu voulait préserver l’église. Il demanda pardon et retrouva l’usage de son bras.

Mais ni la légende ni le respect séculaire ne devaient arrêter le régime de Bagdad, comme le raconte aujourd’hui un maquisard chaldéen: «une nuit d’autome 1978, quelques 500 soldats irakiens encerclèrent notre village. Nous fûmes réveillés à l’aube et regroupés. Enfants, femmes et vieillards étaient aussi contraints de voir ce qui allait se passer. Des bombardiers survolaient la région. Un groupe de soldats a miné les murs du village et de l’église. Nous étions persuadés que la même opération se déroulait aussi dans d’autres villages, tous habités par des Kurdes.
Sur ordre des soldats, les villageois ont formé une longue colonne qui s’est mise en marche. Nous n’étions pas éloignés du village quand une terrible explosion a fait trembler la montagne. Instinctivement, nous nous sommes tournés vers le village. Mais il n’y avait plus qu’une énorme fumée qui assombrissait le ciel. Les soldats nous ordonnèrent de ne pas regarder et d’accélérer le pas. D’autres explosions ont encore secoué l’atmosphère. Au-dessus de chaques villages dynamités montait une énorme fumée noire.»

Des 30 familles déportées à Diyana, quelques-unes ont pu se réfugier en Iran. D’autres, ont vu leurs membres obligés d’aller se battre pour le gouvernement irakien engagé depuis 1980 dans un effroyable conflit avec l’Iran.
Mais plus grave encore, ces populations d’origine chrétienne, établies depuis toujours sur ces terres, disparaissent dans l’indifférence internationale totale. C’est la raison pour laquelle nous avons voulu rompre le silence et parler pour ceux qui meurent, sans voix et sans espoir.